Inv.SDE/kc-27070
Le Nkisi du Conservateur
Origine : Objet récolté au Congo Belge en 1956,
Entré dans les Collections en Octobre 2003
Description :
Nkisi (Fétiche) d’origine Bas Congo en
ivoire, datation probable d’avant le XVIIème siècle.
Matière : Ivoire, verre, matières organiques. Hauteur
: 16 cm sur une base ovale d’un diamètre maximum de 8,5
cm. Rarissime nkisi ayant probablement appartenu à un dignitaire
de haut rang, les yeux et la charge magique (bilongo) sont recouverts
de verre transparent.
Note :
Une fois de plus nous insistons sur le côté
exceptionnel de cet objet. Pour analyser cette sculpture, nous nous
sommes référés à l’excellent ouvrage
« Le Geste Kongo » publié par le Musée Dapper,
avons suivi les conseils de l’antiquaire bruxellois Gérard
Sand et analysé le témoignage direct de m. Willy Chelman.
Malgré qu’aucun équivalent de Nkisi en ivoire
n’apparaisse dans le livre-catalogue du Musée Dapper
(en dehors de pommeaux de bâtons), la matière même
de l’objet détermine qu’il fut créé
pour un notable ou dignitaire de haut rang. Le corps légèrement
penché en arrière, jambes fléchies et les yeux
couverts de verre, nous permettent de penser que le fétiche
représente une ancêtre nganga (expert rituel ou sorcier
pour certains), la couleur blanche de l’ivoire étant
celle des Simbi (esprits de la classe supérieure des morts),
des ancêtres passés dans l’autre monde. La figure
est notoirement féminine, le regard vitré lui donne
pouvoir de consulter le royaume invisible. L’orante, les genoux
fléchis dans la position dite « ntelemono mu fwokama
», sollicite les faveurs de divination ou de guérison
(et peut-être les deux) du monde des esprits.
Commentaire recueilli auprès de m. Willy
Chelman et transcrit par le Conservateur:
En fouillant une vieille malle qui n’avait pas
été ouverte depuis plus de quarante ans, ce fétiche
fut retrouvé.
En 1956, m. Chelman, mon père, travaillait pour la Shell au
Congo, à cette époque il habitait Luluabourg (Kananga)
dans le Kasaï.
Ma mère venait de perdre un premier enfant, et en attendait
un second (moi). Bien entendu, après cette triste expérience,
mes parents vivaient dans l’angoisse du second accouchement.
Ils avaient alors à leur service, deux « boys »,
Pedro et Marcel. Pedro Lemba était d’origine Bakongo
et, voyant le désarroi de mes parents, leur offrit ce Nkisi
qui appartenait, il y a très longtemps à un très
puissant nganga, dit-il. Mon père accepta le cadeau mais le
nettoya, lui enlevant sa patine originale. Pedro ajouta qu’il
avait toujours été dans sa famille, et que les enfants
nés sous sa protection possédaient des pouvoirs «
magiques ». Il fit également mention de l’ancêtre
Nkasu, mais je n’ai pas pu déterminer exactement le sens
de ce mot.
En tout cas, il porta chance à mes parents et l’accouchement
se passa sans problème.
Ce qui ne prouve rien quant au « pouvoir magique » du
nkisi car mes frère et sœur naquirent également
dans de bonnes conditions, mais à cette époque le fétiche
était déjà rangé dans une malle !
Néanmoins, je suis le seul membre de ma famille à être
entré dans l’univers fantasmagorique du Surnatéum
et mon appartement ressemble de plus en plus à l’antre
d’un féticheur…